Ce sera la transaction la plus importante de l'année, voire de la décennie, dans le vignoble bordelais. Colony Capital a annoncé dimanche soir la cession de Château Lascombes à la mutuelle des professionnels de la santé MACSF. Le domaine, classé second grand cru 1855 et bénéficiant de l'appellation d'origine contrôlée Margaux, a été valorisé à un prix légèrement supérieur à 200 millions d'euros.
Le travail réalisé par Colony Capital, par ailleurs actionnaire d'Accor et de Carrefour, au cours de la dernière décennie a visiblement porté ses fruits. Le fonds d'investissement américain avait acquis une participation majoritaire (55%) de Château Lascombes en 2001, déboursant, avec 15 autres actionnaires, 505 millions de francs, soit environ 77 millions d'euros. Le domaine est, à l'époque, déjà convoité pour sa taille - le double voire le triple des domaines de la rive gauche bordelaise (Médoc et Graves), mais la qualité de sa production laissait à désirer.
Sous la direction générale de Dominique Befve, recruté par Colony auprès de Château Lafite Rothschild, et avec une dizaine de millions d'euros apportée par le fonds, le domaine est revu de fond en comble. «Château Lascombes a retrouvé son rang», témoigne le président de son conseil d'administration et membre de l'équipe européenne de Colony, Jean-Romain Lhomme.
Rien d'étonnant à ce que les deux banques mandatées, HSBC et Rothschild&Cie, aient reçu de nombreuses marques d'intérêts, bien plus que lorsque Colony avait cherché à céder son actif une première fois en 2006. Plusieurs industriels et investisseurs, d'Europe et d'ailleurs - un groupe chinois notamment -, étaient cette fois sur les rangs pour acquérir le premier producteur en volume de vins AOC Margaux, avec une production annuelle supérieure à 500.000 bouteilles. Château Lascombes est commercialisé dans le monde entier: deux bouteilles sur cinq partent aux États-Unis et une sur trois vers l'Asie.
Outre les plus de 110 hectares de vignes, Colony cède un château datant de 1867, mais surtout le stock de la production de 2010, évalué à environ 20 millions d'euros. Le choix s'est finalement porté sur la MACSF, notamment en raison de la volonté de cette dernière d'investir à long terme, même si sa nationalité a sans doute pesé dans la balance.